Universite de Bordeaux 3.
Dans le champ actuel de la philosophie, la notion de « ressources » renvoie plutôt aux problèmes de « philosophie de l’environnement ». Je propose d’aborder ce concept à la lumière de la question du temps. Le psychologue Robert Levine a caractérisé les pays développés par la notion de « time famine » (Geography of time, 20062, p. 13). Dans son ouvrage récent Accélération, le sociologue et philosophe Harmut Rosa évoque la « réduction des ressources temporelles » (Verknappung der Zeitressourcen) comme conséquence de l’accélération des sociétés contemporaines (trad. La Découverte, 2010, p. 320).
Mon propos serait d’interroger les présupposés d’une telle conception du temps en termes de « ressources », qu’on peut avoir ou non, disposer en plus ou moins grande quantité, économiser ou gaspiller. Il s’agit ensuite d’analyser la notion d’urgence comprise comme épuisement des ressources temporelles, qui semble affecter les individus – en premier lieu à travers le manque de temps – dans leur vie tant professionnelle que privée. Le paradoxe de l’urgence à étudier plus particulièrement est que plus on dispose de moyens techniques pour gagner du temps (transports, communications), moins on en a, plus on est « débordé ». Si le temps est une ressource, il est une ressource qui semble s’épuiser à mesure qu’elle augmente. Dans un troisième temps, il faudrait examiner comment le thème de l’épuisement des ressources temporelles se retrouve sous une forme mondialisée avec le problème du réchauffement de la planète, ce qu’on a appelé « l’urgence climatique ».
When the temporal resources run out : urgency. In the current field of philosophy, the notion of resources concerns more problems of “environmental philosophy”. I would like to put forward this concept in light of the question of time. The psychologist Robert Levine characterized developed countries by the notion of a “time famine” (Geography of Time, 20062, p. 13). In his recent work “Acceleration”, the sociologist and philosopher Harmut Rosa talks about “the reduction of temporal resources” as a consequence of the acceleration of contemporary societies (Beschleunigung, 2005, p. 408).
My objective will be to find out presuppositions of such a conception of time in terms of “resources” that can be had or not, used in smaller or greater quantities, be saved or wasted. Then the notion of urgency, defined as the running out of temporal resources, which seems to affect people in their private and professional lives, will be analysed. The paradox of urgency, to be studied in more detail, is that the more high technology that we have available to save time (transport, communication), the less time we have, the more that we are overwhelmed. If time is a resource, it is a resource that seems to get used up as it increases. In a third part, I would like to examine how the theme of running out of temporal resources is related to the problem of global warming, which is called “climatic urgency”.