IUF 20 ans
 

La bio­di­ver­sité mena­cée par le chan­ge­ment cli­ma­ti­que ? La réponse des modè­les

Laurent Desvillettes

ENS de Cachan.

Régis Ferrière

ENS d’Ulm.

On sait aujourd’hui que la diver­sité des espè­ces vivan­tes, fonc­tion des res­sour­ces du milieu et elle-même res­source-clé pour la popu­la­tion humaine, est influen­cée par le chan­ge­ment cli­ma­ti­que, mais on mesure encore très mal l’étendue actuelle et future, les méca­nis­mes et les consé­quen­ces de cette influence. Laurent Desvillettes (ENS Cachan, Mathématiques) et Régis Ferrière (ENS Ulm, Biologie) pré­sen­tent un exposé plu­ri­dis­ci­pli­naire pour mon­trer l’apport de la modé­li­sa­tion mathé­ma­ti­que à cette ques­tion écologique d’impor­tance pla­né­taire.

Les popu­la­tions des espè­ces répon­dent au chan­ge­ment cli­ma­ti­que en pour­sui­vant géo­gra­phi­que­ment leur “niche” cli­ma­ti­que à mesure que celle-ci se déplace, ou en s’adap­tant aux nou­vel­les condi­tions qui pré­va­lent loca­le­ment. Dans la pre­mière partie de l’exposé, pré­sen­tée par L. Desvillettes, on intro­duit les concepts mathé­ma­ti­ques qui per­met­tent d’étudier le dépla­ce­ment d’une popu­la­tion dans un envi­ron­ne­ment qui se modi­fie gra­duel­le­ment au cours du temps ; parmi ces concepts figu­rent la dif­fu­sion induite par les dépla­ce­ments aléa­toi­res des indi­vi­dus, et la crois­sance logis­ti­que qui prend en compte la concur­rence locale entre orga­nis­mes pour des res­sour­ces limi­tées. Sous l’influence de ces deux pro­ces­sus, on démon­tre que la popu­la­tion pro­page ses indi­vi­dus selon une onde pro­gres­sive. Lorsque le climat change, l’avenir de la popu­la­tion est déter­miné par les pro­prié­tés de cette onde : la popu­la­tion per­siste si la vitesse propre de l’onde est suf­fi­sante ; elle s’éteint sinon.

Dans la deuxième partie de l’exposé, R. Ferrière repla­cera les hypo­thè­ses et pré­dic­tions de ces modè­les dans la pers­pec­tive de l’étude de sys­tè­mes réels. Sur la base de don­nées expé­ri­men­ta­les, on sou­li­gnera l’impor­tance poten­tielle du pro­ces­sus d’adap­ta­tion locale. Pour en étudier mathé­ma­ti­que­ment l’effet, on modé­lise une varia­bi­lité héri­ta­ble de la mobi­lité ou du cycle de vie des indi­vi­dus. Des simu­la­tions numé­ri­ques révè­lent que, selon le type d’orga­nisme et de milieu, la survie d’une espèce sou­mise au chan­ge­ment cli­ma­ti­que est favo­ri­sée ou au contraire, para­doxa­le­ment, com­pro­mise par la capa­cité d’adap­ta­tion locale. Ces résul­tats mon­trent l’inté­rêt d’une appro­che véri­ta­ble­ment plu­ri­dis­ci­pli­naire, asso­ciant mathé­ma­ti­ques fon­da­men­ta­les, simu­la­tion numé­ri­que et bio­lo­gie expé­ri­men­tale, pour mieux com­pren­dre les effets mul­ti­ples, directs et indi­rects, du chan­ge­ment cli­ma­ti­que sur la bio­di­ver­sité.

The possible effect of climate change on biodiversity : what can the model tell us ?

The diver­sity of living spe­cies depends on the resour­ces of their habi­tat and is itself a key resource for humans. We now know that this diver­sity is influen­ced by cli­mate change, but it is very dif­fi­cult to assess the extent and the conse­quen­ces of this influence. Laurent Desvillettes (ENS Cachan, Mathematics) and Régis Ferrière (ENS Ulm, Biology) pre­sent a mul­ti­dis­ci­pli­nary talk in which they show how mathe­ma­ti­cal model­ling can contri­bute to the study of this cri­ti­cal issue.

The popu­la­tions of a spe­cies expe­rien­cing cli­mate change geo­gra­phi­cally track their eco­lo­gi­cal niche when the niche moves (typi­cally towards the poles or to higher ele­va­tion). In the first part of the talk, pre­sen­ted by L. Desvillettes, the mathe­ma­ti­cal concepts used to study the move­ment of a popu­la­tion in a chan­ging envi­ron­ment are intro­du­ced. Among these concepts is dif­fu­sion to model the pro­cess of random mobi­lity of indi­vi­duals and logis­tic growth to account for the limi­ted resour­ces that indi­vi­duals com­pete for. We show that the resul­ting popu­la­tion dyna­mics are des­cri­bed by pro­gres­sive waves. When cli­mate chan­ges, the fate of the popu­la­tion is deter­mi­ned by the pro­per­ties of the wave : the popu­la­tion goes extinct if the wave’s velo­city is too slow.

In a second part of the talk, R. Ferrière will com­pare the pre­dic­tions of the models with the obser­va­tions made on real eco­lo­gi­cal sys­tems. He will under­line the impor­tance of the pro­cess of local adap­ta­tion. Numerical simu­la­tions show that, depen­ding on the type of orga­nisms, the sur­vi­val of a spe­cies sub­mit­ted to cli­mate change can be favou­red or some­ti­mes, para­doxi­cally, hin­de­red by its capa­city to adapt rapidly to local condi­tions.

We hope to demons­trate the value of a mul­ti­dis­ci­pli­nary approach to study the impact of cli­mate change on bio­di­ver­sity, in which mathe­ma­ti­cal model­ling, com­pu­ta­tio­nal methods and bio­logy are com­bi­ned in a fruit­ful and mutually bene­fi­cial inte­rac­tion.